jeudi 26 février 2009

La jouissance de l'oeil esthétique (modifié)

"Le regard informe, là où la vision reforme." Jean-Loup Rivière, Chronique du 23 février 2009, France Culture (puisse-t-il me pardonner de l'avoir sorti de son contexte).

À l'écoute, cette phrase m'a provoqué une déflagration interne. Effectivement, outre le genre, la différence entre un regard et une vision est nette. Développons.


"Le regard informe".
Le Regard est une tentative de transcription neutre du réel. À travers lui, tout en gardant à l'esprit l'invariable échec de l'objectivité, on informe le "regardant" (lecteur ou spectateur potentiel) de quelque chose, sans lui induire de point de vue déterminé, de forme. Il peut de cette façon, guilleret, se composer lui-même une pensée en s'appuyant sur ledit Regard. En l'informant, le Regard forme donc la pensée du "regardant" car il lui laisse un espace, condition nécessaire à son existence.
"(...) là où la vision reforme."
La Vision prend ancrage dans le réel, puis le transcende en le réinterprétant : elle lui donne de cette façon une consistance nouvelle. Une Vision se suffit à elle-même ; lorsqu'elle est réussie, elle reforme le réel, rendant subitement accessible l'insaisissable de la pensée humaine. Oserai-je alors dire qu'elle nous offre un ineffable orgasme intellectuel ? Non, je suis trop prude.


Commentaire de Sébastien Hayez :

"Très intéressant, même si je n'ai pas entendu l'émission.
Tu passes à côté de l'aspect "visionnaire" de la vision (même si tu la pressens) : si je prend la vison dans son autre sens, non optique, la vision reforme car avoir une "vision" c'est reconnaitre les choses d'emblée, être dépassé, être révélé par une image, ou la vision d'une image (image produite par l'homme ou l'œil).

Le regard serait presque seulement, une orientation du fait de "voir".


Si je fais l'analogie avec le son…
Le regard serait "entendre" quand la vision serait au delà de l'écoute : la compréhension d'une écoute.

Là, où je peux te rejoindre et percevoir ce que tu peux comprendre, c'est que dans l'image, une description du réel est incomplète tant qu'on ne l'a pas dépassé par une traduction "visionnaire", réinterprétée qui saura lui donner une forme traduite, à la hauteur de ce que tu as pu en comprendre, ou ressentir.

Peut-être que je m'égare trop."

Commentaire réponse :
"En fait, je crois que ma note n'est pas très claire. Ce que tu définis comme "visionnaire", c'est exactement ce que j'ai voulu dire.

Déjà, je ne parlais pas du tout de la Vision et du Regard en terme physiologique, mais en terme d'expression. C'était une exploration, toute subjective, de la différence entre l'expression d'un Regard et l'expression d'une Vision.

Pour essayer de résumer mon propos, la Vision a une dimension artistique intrinsèque que le Regard n'a pas.
Par contre, le Regard peut être à l'origine d'une Vision, car il inclut "l'Autre", contrairement à la Vision qui se suffit à elle-même.
Pour illustrer, le théâtre de Ionesco serait une Vision, une recette de cuisine un Regard...

Je ne sais pas si nous sommes réellement d'accord quand tu dis qu'un Regard seul sur le réel est incomplet. Pour moi les deux approches — Regard et Vision — sont intéressantes, quoique de styles différents.
Bon, j'avoue, j'ai un faible pour les Visions car elles me bouleversent plus."

2 commentaires:

Sébastien Hayez a dit…

Très intéressant, même si je n'ai pas entendu l'émission.
Tu passes à côté de l'aspect "visionnaire" de la vision (même si tu la pressens) : si je prend la vison dans son autre sens, non optique, la vision reforme car avoir une "vision" c'est reconnaitre les choses d'emblée, être dépassé, être révélé par une image, ou la vision d'une image (image produite par l'homme ou l'œil).

Le regard serait presque seulement, une orientation du fait de "voir".

Si je fais l'analogie avec le son…
Le regard serait "entendre" quand la vision serait au delà de l'écoute : la compréhension d'une écoute.

Là, où je peux te rejoindre et percevoir ce que tu peux comprendre, c'est que dans l'image, une description du réel est incomplète tant qu'on ne l'a pas dépassé par une traduction "visionnaire", réinterprétée qui saura lui donner une forme traduite, à la hauteur de ce que tu as pu en comprendre, ou ressentir.

Peut-être que je m'égare trop.

laurie thin** a dit…

En fait, je crois que cette note n'est pas très claire. Ce que tu définis comme "visionnaire", c'est exactement ce que j'ai voulu dire.

Déjà, je ne parlais pas du tout de la Vision et du Regard en terme physiologique, mais en terme d'expression. C'était une exploration, toute subjective, de la différence entre l'expression d'un Regard et l'expression d'une Vision.

Pour essayer de résumer mon propos, la Vision a une dimension artistique intrinsèque que le Regard n'a pas.
Par contre, le Regard peut être à l'origine d'une Vision, car il inclus "l'Autre", contrairement à la Vision qui se suffit à elle-même.
Pour illustrer, le théâtre de Ionesco serait une Vision, une recette de cuisine un Regard...

Je ne sais pas si nous sommes réellement d'accord quand tu dis qu'un Regard seul sur le réel est incomplet. Pour moi les deux approches — Regard et Vision — sont intéressantes, quoique de style différents.
Bon, j'avoue, j'ai un faible pour les Visions car elles me bouleversent plus.